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Friday, December 21, 2012

...Et la colonisation de la Tunisie?

Après l’Algérie, la France doit reconnaître la colonisation en Tunisie  20/12/2012

Après l’Algérie, la France doit reconnaître la colonisation en Tunisie

Le Président français a reconnu ce jeudi 20 décembre devant le parlement algérien, le système colonial "profondément injuste, brutal et destructeur" en Algérie. François Hollande, en visite d’Etat de deux jours en Algérie, a également admis "les souffrances infligées au peuple algérien". Même s’il a réfuté toute repentance ou excuse pour les exactions commises par ses aînés colonisateurs, Hollande a condamné la colonisation en des termes beaucoup plus francs et forts que ne l’ont fait ses prédécesseurs, et a exigé d’établir la vérité sur "la torture et les massacres", commis pendant la guerre d’Algérie.

L’aveu de vérité du locataire de l’Elysée tranche avec la position affichée jusque-là par la France envers son passé colonial, lequel a été glorifié par la loi de 2005 voté par l’Assemblée nationale et le Sénat français attestant du rôle positif de la colonisation notamment en Afrique du Nord, une loi qui a, à l’époque, provoqué un tollé notamment en Algérie. A l'inverse de notre voisin de l'Ouest, la Tunisie a toujours omis son passé colonial et persiste, hélas, à l'escamoter.


L’occupation française s’est poursuivie pendant plus d’un siècle en Algérie, 132 ans plus précisément, et en a demeuré trois quarts de siècles (75ans) en Tunisie, du 12 mai 1981, date du traité du Bardo instituant le protectorat français au 20 mars 1956, date de l’indépendance. 75 ans au cours desquels toute une génération de militants, des Tunisiens patriotes et dévoués, ont livré une bataille sans merci contre l’occupant, et ont mené avec bravoure le mouvement de libération national ayant conduit à l’indépendance du pays.


Au faîte de la lutte pour l’indépendance, les précurseurs du mouvement national étaient mus par un seul objectif, soit la libération de la patrie et la restitution de la souveraineté et des droits du peuple tunisien. En revanche, plus leur bataille aboutissait, et plus ils étaient proches de la libération, plus les différends les opposant, ont commencé à apparaître au grand jour, a fortiori sur l’orientation qu’allait prendre la jeune Tunisie indépendante. En effet, le différend entre le Premier président de la Tunisie, Habib Bourguiba et le leader Salah Ben Youssef, a éclaté avec la signature des accords ayant mené à la proclamation en juin 1955 par la France de l’autonomie interne de la Tunisie. Ils se sont exacerbés au point de la rupture, avec leur différence d’approche envers le devenir de la nation postcoloniale. Bourguiba était pour la modernisation et la laïcisation de la Tunisie, selon le modèle français occidental, et Salah ben Youssef prônait un modèle nationaliste, panarabe qui voulait inscrire la Tunisie dans sa profondeur arabo-musulmane.


C’est dire que le passé agité et lourd de la Tunisie au cours des dernières soixante années, puise ses racines dans la période coloniale. A l’heure où on parle d’établir la vérité sur notre histoire, et de se réconcilier avec notre passé dans le cadre de la justice transitionnelle, il convient de s’arrêter à l’époque coloniale, de demander à la France de reconnaître les injustices, les exactions et les dérives de son système colonial en Tunisie, et de lever le voile sur toutes les archives, notamment celles portant sur l’assassinat de Farhat Hached en 1952 par la main rouge, et sur les complicités qui ont pu exister côté tunisien.


La loi sur la justice transitionnelle destinée à révéler la vérité sur les épisodes décisifs de l’histoire tunisienne ; sur les sévices et violations contre les droits de l’Homme ; sur les procès politiques contre la gauche, les youssefistes, les nationalistes, les islamistes, les syndicalistes et les vagues de répression qui s’en sont suivies ; sur les tentatives de putsch, etc. couvre la période de 1955 jusqu’à la date de sa promulgation, et passe outre les 74 ans restants de la colonisation française. Or, c’est de cette période qu’a découlé la dictature et les dérives du régime Bourguiba, aggravées lors du règne de Ben Ali. Il ne faut pas oublier que sous l’occupation française, les Tunisiens ont été dépossédés de leur liberté, de leur dignité, et de leur souveraineté, considérés qu’ils étaient comme des citoyens de seconde zone, privés du droit de disposer d’eux-mêmes et de bâtir leur nation. Que la demande de reconnaissance de la colonisation par la France n’a jamais été formulée sérieusement par la partie tunisienne sous la dictature, cela est compréhensible ; mais que cette revendication ne s’exprime pas, après la révolution, voici qui est inadmissible.


La Tunisie ne peut pas établir son devoir de mémoire, et faire la paix avec son passé, si elle regarde l’histoire d’une manière sélective par le petit bout de la lorgnette. Le despotisme et la répression que l’on cherche à mettre à nu, ne sont pas nés ex-nihilo, ils sont la résultante du système patriarcal institué par Bourguiba et qui tirait sa force de la colonisation et de la décolonisation. La Tunisie doit emboîter le pas à l’Algérie et prendre ce dossier à bras le corps. Elle doit demander officiellement à la France d’établir toute la vérité sur la période coloniale, et de lui donner accès aux archives ; c’est seulement ainsi que l’on rendra justice à toutes les victimes et leurs familles, sans exception et que l’on éclairera l’ensemble des zones d’ombre. Autrement, ce sera une lecture tronquée de l’histoire, incapable de refermer les cicatrices et de soulager les souffrances encore enfouies chez de nombreux Tunisiens et chez les familles des martyrs de la lutte nationale.

H.J.


http://www.gnet.tn/temps-fort/apres-lalgerie-la-france-doit-reconnaitre-la-colonisation-en-tunisie/id-menu-325.html http://www.gnet.tn/temps-fort/apres-lalgerie-la-france-doit-reconnaitre-la-colonisation-en-tunisie/id-menu-325.html

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